La Loire est le plus long fleuve de France, avec une longueur de 1 012 km.
Si son estuaire est bien connu, sa source est plus controversée.
C'est ainsi qu'on relève trois sources officielles situées en Ardèche, au Mont Gerbier de Jonc.
Mais on pourrait en étendre la liste :
- si on s'en tient à la règle qui veut que le fleuve soit le cours le plus long, la source serait alors celle de l'Aigue Nègre, son premier affluent.
- si on fait abstraction de cette règle, la configuration géographique au niveau du confluent pourrait amener à la conclusion que le la partie amont du fleuve est en fait celle que nous considérons comme l'Allier.
- sans compter une hypothèse qui voudrait qu'avant les bouleversements apportés par l'apparition des Alpes, la Loire amont rejoignait le Bassin Parisien et le cours actuel de la Seine vers la Manche. La source de la Loire aval
serait alors celle du Loing.
Le
bassin versant s'étend sur 117500 km2, soit plus de 20% du territoire français.
Du Massif Central aux côtes de l'Atlantique, la diversité des climats rencontrés explique en partie les variations importantes de débits rencontrés en fonction des périodes de l'année.
Le cours du fleuve est constitué d'une succession de paliers relativement plats "en escaliers", dans lequel il s'écoule en période de basses eaux dans des chenaux
dont le tracé change chaque année au moment des crues.
Dans les passages de faible pente, la Loire se décharge des alluvions arrachés en amont, ce qui a pour conséquence de remonter son lit. Une partie de l'eau circule alors en souterrain, provoquant des résurgences (ex : le
Loiret), tandis que les affluents doivent longer le lit principal avant de confluer à un niveau plus bas (ex : le Cher, la Vienne, l'Authion).
Les affluents principaux de la Loire se situent sur sa rive gauche.
La Maine est une exception : située rive droite, elle n'est longue en fait que d'une dizaine de kilomètres, étant constituée de la réunion de trois rivières importantes : la Mayenne, la Sarthe
et le Loir (en réalité, le Loir conflue avec la Sarthe deux kilomètres en amont).
Les autres également reçoivent les eaux de sous affluents importants, comme la Sioule (Allier), la Sauldre (Cher), la Creuse et le Clin (Vienne), l'Huisne
(Sarthe), l'Oudon (Mayenne) ...
Ce sont les apports d'eau simultanés de ces rivières qui provoquent les montées d'eau spectaculaires que connaît la Loire.
La Loire est souvent présentée comme le dernier fleuve "sauvage" de France.Pourtant, depuis toujours, des aménagements ont été effectués pour protéger les riverains et leur habitat.
Dès l'antiquité, on relève la présence d'habitats sur les varennes, les monticules insubmersibles du lit de la Loire où se réfugiaient hommes et animaux en période de crues. Mais si ces parties élevées assuraient la sécurité des habitants, il n'en était pas de même pour leurs cultures qui s'étendaient dans les parties fertilisées naturellement par les inondations.
A l'époque de Charlemagne, on note déjà l'existence de turcies dans le lit de la Loire. Leur rôle n'est pas d'éviter l'inondation, mais de ralentir le courant, en le détournant au maximum des espaces cultivés.
Au XIIe siècle, Henri II Plantagenêt fit édifier en Anjou les premières levées. Pour s'assurer de leur entretien, il accorda à ceux qui en étaient chargés de nombreux privilèges, allant jusqu'à leur faire construire des maisons sur la levée elle-même.
Au fil des ans, ces travaux se renforcèrent. Ce fut le cas en particulier avec le Roi René (plus particulièrement Jeanne
de Laval et Marguerite d'Anjou).
Avec le rattachement à cette époque de l'Anjou au royaume de France, la levée s'étend dans les années suivantes pour devenir presque sans interruption de Gien à Angers.
La construction de cette levée poursuivait un double objectif :
- d'une part protéger les cultures et les richesses, ainsi que la population riveraine qui s'accroissait rapidement
- d'autre part, et peut être surtout de maintenir dans le lit mineur de la Loire un débit suffisant en période d'étiage pour permettre la navigation fluviale et les échanges commerciaux.
Ces mêmes échanges furent d'autre part facilités par l'établissement de grands chemins à l'abri de toute interruption par les crues.
Au début du XVIIe siècle eurent lieu des inondations catastrophiques (cf. le déluge de Saumur, en 1615).
Devant le constat qu'il est impossible de contenir les plus grandes crues, on envisagea la mise en place de 6 déchargeoirs en amont de Saumur. Ces zones étaient susceptibles d'être inondées délibérément pour
préserver le reste de la vallée, au besoin par rupture volontaire de la levée à cet endroit.
Ces déchargeoirs seront plus tard renommés déversoirs, mais vite abandonnés parce qu'inefficaces.
A l'initiative de Colbert, on procéda alors à la surélévation des digues jusqu'à une hauteur de 7m au-dessus de l'étiage, ce qui eut pour effet indirect la destruction de tous les ponts médiévaux qui n'étaient prévus que pour laisser passer des hauteurs d'eau de 5m ...
La continuité de la levée sera achevée en 1743. Une pyramide commémore cet événement à son extrémité (Trélazé)
A la révolution, on assiste à un abandon plus ou moins complet de l'entretien des digues. C'est peut être en partie l'explication des catastrophes qui vont marquer le siècle suivant.
Les crues successives du XIXe siècle marquent encore la mémoire des habitants de la vallée : 1846, 1856, 1866, auxquelles on peut rajouter celles de 1907 et 1910.
Si la crue de 1856 reste celle qui a marqué le plus par son ampleur, elle n'est pas toujours celle qui a eu les conséquences les plus destructrices en fonction de l'endroit géographique où on se trouve : en amont d'Orléans, les crues de 1846 et 1866 la dépassent, aux Ponts de Cé, elle n'arrive qu'au quatrième rang après 1982, 1910 et 1866 ...
De nos jours, la construction des centrales nucléaires (Dampierre, St Laurent, Chinon) nécessitent des précautions particulières pour contrôler le niveau de la Loire.
Elle a entraîné la création des barrages de régulation de Naussac et de Villerest.
L'aménagement de déversoirs, conformément à l'étude réalisée en 1867 à la suite des crues majeures des années précédentes, vient renforcer le dispositif en permettant de choisir les portions du lit majeur de la Loire à inonder en priorité pour assurer la sauvegarde de l'ensemble de l'ouvrage.
La crue de 1856 est celle qui sert encore de nos jours de référence pour tout ce qui touche au risque inondation et à sa prévention.
Elle a été remarquable non seulement par les niveaux atteints, mais aussi par ses conséquences et l'étendue du phénomène.
En effet, si la crue de la Loire a été exceptionnelle cette année-là, au même moment le Rhône connaissait le même phénomène, entraînant des inondations catastrophiques de Lyon à la méditerranée.
De même, les débordements se sont révélés particulièrement destructeurs
pour de petites communes rurales des bassins montagnards alpins.
En dehors des niveaux exceptionnels de 1843 et 1846, la Loire avait connu plusieurs débordements de moindre importance. Des travaux de consolidation avaient été réalisés (comme les quais de Saumur), mais les ouvrages de protection restaient fragiles et étaient régulièrement submergés en certains endroits.
L'automne-hiver 1855 avait vu déjà une crue importante de la Loire amont, sans forte conséquence. Mais les sols étaient saturés et n'arrivaient pas à absorber les pluies abondantes et continuelles de janvier à juin.
En réalité, ce sont 4 crues qui se succèdent du 3 mai au 22 juin 1856.
La première passe relativement inaperçue au niveau du Maine et Loire.
La deuxième, le 15 mai, provoque la rupture de la digue rive droite, au niveau de Rigny-Ussé. Toute la basse vallée de l'Indre est inondée (jusqu'à Port-Boulet). Dans le même temps, la Vienne connaît une forte crue et les eaux
des deux rivières se confondent, inondant le Veron et en particulier la commune de Savigny.
Après une accalmie de quelques jours une nouvelle vague de pluies provoque une montée simultanée des niveaux dans tous les bassins qui alimentent la Loire.
Le 4 mai au matin, l'échelle du pont Cessart indique 6,80 mètres. Le niveau continue à s'élever et dépasse 7m quand tout à coup dans l'après-midi, il se met brusquement à descendre.
la cause en sera rapidement connue : dans la nuit précédente, à 4h30, la Loire avait ouvert une brèche de 200m de long à la Chapelle Blanche (La Chapelle sur Loire) et envahissait la vallée de l'Authion.
Très rapidement, tout le lit majeur du fleuve côté rive droite : Restigné, Bourgueil, St Nicolas, Chouzé, Varennes (sauf le bourg), Allonnes, Villebernier ... est submergé.
La route de Saumur à Vernantes est franchie le 5 à 4h du matin, Vivy est sous les eaux dans la matinée.
La campagne de Longué est touchée en début d'après midi, mais la crue s'arrête aux premières maisons du Vieux Bourg.
A 18h, Beaufort est submergé, puis Gée, Mazé, La Ménitré vers 23h...
Le lendemain, les ardoisières de Trélazé sont atteintes et l'eau s'engouffre successivement dans les différents puits. Tout le site sera inondé le 7 au soir.
En aval d'Ancenis, la toute nouvelle levée de la Divatte sera elle aussi emportée le 9 juin, noyant les communes riveraines et une partie des quartiers de Nantes.
Dans les jours qui ont précédé la catastrophe, un maximum de moyens avait été mis en oeuvre pour essayer de l'éviter.
Aux différents endroits qu'il fallait consolider ou rehausser par tous les moyens, c'étaient plus de 4000 personnes qui travaillaient sans relâche.
En parallèle, l'évacuation des habitants les plus vulnérables avait commencé.
Ces précautions ont permis de sauvegarder un maximum de vies humaines : une trentaine de morts "seulement" est à déplorer pendant ces journées.
Il n'en sera malheureusement pas de même dans l'année qui suivra, compte tenu de la situation de grande précarité qui en découlera pour les riverains.
Au
point de vue matériel, le bilan est lourd.
Du Bec d'Allier à Nantes, on compte 160 brèches, d'une longueur totale de 23 km.
100000 ha sont inondés, dont 3000 de terres cultivées qui ont disparu, soit par érosion, soit par ensablement.
Un grand nombre de maisons sont détruites.
3 ponts, ainsi qu'une centaine de kilomètres de voies ferrées sont emportés.
Les villes de Nevers, Orléans et de Tours sont gravement touchées.
Dans le val d'Authion, la zone dévastée s'entend sur 80 km de long et environ 12 de large.
Dans le centre de la Chapelle, un lac de 180m de long et 280m de large, avec une profondeur de 17m à l'endroit initial de la rupture, remplace les maisons qui ont été emportées, ainsi que le château.
Avant la catastrophe, le bourg comptait 3500 habitants ; seuls 250 reviendront s'y installer par la suite.
Les puits des ardoisières de Trelazé sont totalement envahis. La production est stoppée sur tous les sites. Il faudra trois mois pour vider le site des Grands Carreaux.
En de nombreux endroits, l'eau mettra plusieurs mois à se retirer, favorisant le développement des maladies chez les habitants qui avaient déjà tout perdu.
Cette situation va engendrer un grand élan de solidarité de la part des villes et communes voisines, en premier lieu des Saumurois qui avaient été relativement épargnés.
L'empereur Napoléon III lui même, à peine rentré de sa visite aux sinistrés de la vallée du Rhône, se rend à Angers et Trélazé, puis
de là à Nantes pour assurer les victimes du soutien de l'état.
Quelques mois plus tard, il décernera la Légion d'Honneur à ceux qui s'étaient distingués par leur bravoure lors de ces journées ; parmi eux, le curé de Longué, l'abbé Massonneau.